Alors voilà, j’avais envie de pousser un petit coup de gueule… Après tout je peux le faire. J’ai beaucoup réfléchi à ce que j’allais écrire, à ce que je souhaitais exprimer. Cela faisait un petit moment que j’en avais envie mais comme toujours quand ma première réaction est de me hérisser, j’ai besoin de remâcher les événements avant de mordre.
J’ai suivi de loin la sortie du bouquin d’Eglantine Eméyé, d’ailleurs je l’ai commandé, parce que j’aime bien le titre…Des fois, ça ne tient à rien. J’ai suivi la promo, j’ai écouté ses témoignages, et j’ai lu les réactions épidermiques qu’elle a engendré. En fait, loin d’être le point de départ de cet article, ça a juste été la goutte d’eau. Bien sûr, elle est connue, elle passe partout et son discours est gobé par des milliers de téléspectateurs, est-ce une raison?
Je me suis une nouvelle fois posée LA question qui me taraude depuis longtemps. Comment des parents, déjà mis à mal par la société, par le corps médical, par l’école, par les parents d’enfants normaux, peuvent-ils porter autant de jugements sur les autres parents?
On a tous des choix très difficiles à faire concernant la scolarité, les soins, le suivi et bien d’autres choses concernant nos loulous exceptionnels.
Les médecins…
On doit déjà affronter les médecins, se battre pour obtenir le suivi qu’on aimerait avoir pour eux. Et non, tous les médecins ne sont pas bons à jeter! Il y en a des minables, on en a tous croisé au moins un. Un péteux, un pédant, un Kicétou, un qui se prend pour Dieu, un qui s’en fout. Mais on ne se demande jamais pourquoi cela nous arrive. Peut-être parce qu’on est amenés à croiser plus de médecins que le commun des mortels. Ce qui augmente d’autant nos chances de tomber sur un con, n’ayons pas peur des mots! Tous les kinés ne sont pas anti medek. Certains CAMSP ont de très bons professionnels, et j’ai même eu la chance inouïe de tomber sur une puéricultrice PMI adorable et investie…Si, si, ça existe! Rejeter en bloc tout un système, tous les pros, n’est pas, à mon sens, la solution.Pas mal d’entre eux sont là, à nous tendre la main. Bien sûr, tous ne nous comprennent pas, certains sont très violents et virulents , maladroits, je-m’en-foutistes. Mais d’autres sont à l’écoute, empathiques, gentils. J’ai ouvert les portes de l’associations aux professionnels qui le souhaitaient. J’ai vu arriver quelques ergos, psychomot, kiné, éduc spé. Certains bossent en cabinet, d’autres en CAMSP ou en IME…Ya des bons et des mauvais dans tous les corps de métier.
La scolarité…
L’inscription en maternelle, c’est déjà le parcours du combattant. Ah si, on le veut bien votre enfant, c’est pas un manque de volonté, mais voyez, on a des escaliers…Pis bon, son AVS ne sera là que deux matinées par semaine, restriction budgétaire oblige! Je ne parle même pas de la suite. A compter que l’enfant ait les capacités d’aller au primaire, là encore c’est la bagarre! Et s’il ne les a pas, le choix est désarmant et douloureux. C’est très difficile de faire un choix éclairé, d’obtenir l’aide du corps enseignant, de l’AVS, des avis objectifs sur nos enfants. Ensuite, il faut gagner le bras de fer face à la MDPH aussi.
Les autres parents…
Certains feront le choix de l’école normale, ou de la CLISS, ou d’autres encore de l’école spécialisée. Parfois on a notre enfant juste à côté de la maison. D’autres fois, il est loin. Est-on satisfait des choix qu’on fait? Un parent peut-il se dire content d’avoir son enfant placé en institut en Belgique? Qui est-on pour oser prétendre qu’on sait ce qui est le mieux pour ce gosse? Pour cette famille? En supposant qu’on ait un enfant porteur de la même pathologie, peut-on vraiment se mettre à la place de la famille? est-on dans la même situation? Dans le même état d’esprit, a-t-on la même sensibilité? Juger quand on ne sait pas ce qu’est le handicap au quotidien, c’est déjà fort de café, mais juger quand on sait?!! Quand on subit le regard des gens, de la société, se permettre d’en rajouter une couche? Je le vois bien sur les groupes auxquels je participe. On doit se battre sans cesse pour nos loulous, mais il y a toujours quelqu’un pour estimer qu’il se battrait différemment, ou plus, ou mieux. Alors on pourrait dire que pour vivre heureux, il faut vivre cacher, qu’assumer ses choix, c’est la base de tout, mais ZUT à la fin! Sur ces groupes on cherche du soutien, quand on écrit un livre ou un blog, on raconte son histoire, on ouvre son coeur, on pose des mots pour purger les maux. On cherche pas à prendre des claques dans la figure. Je crois que je ne comprendrai jamais comment un parent, dans une situation similaire à la mienne, peut se permettre de penser qu’il fait mieux que moi. Mon mieux n’est pas le votre, mon enfant n’est pas le votre. Je ne fais pas mieux que vous non plus. Je fais comme je peux, ces parents font comme ils peuvent. On a le droit de ne pas être d’accord, bien sûr. De poser des arguments, de discuter. De là à juger, à lyncher, à dénigrer, il y a une immense différence!
Voilà, j’ai fini. Je sais bien que je suis une idéaliste, un peu fleur bleue. J’aimerai qu’on vive tous paisiblement les uns près des autres, qu’on se regarde avec bienveillance, qu’on soit capable de faire l’inverse de l’autre sans devoir justifier notre décision par une attitude méprisante. Je sais que j’ai eu de la chance, pour le moment les critiques ont été plutôt rares. Je me suis battue pour ma fille, j’ai fait des choix qui parfois m’ont coûtés. Je sais aussi que je n’ai pas eu besoin de courir l’Europe pour obtenir une meilleure prise en charge parce que son handicap est léger! (même le mot me fait rire, car au quotidien, ce n’est pas toujours léger…). Peut-être qu’un peu de tolérance, ça ne serait pas du luxe!!
